Ode aux artistes passionnés (et mort à l'IA qui prétend les remplacer)
Je n'écris pas pour être riche ou populaire. J'écris parce qu'il y a des artistes passionnés et talentueux, là-dehors, et que je meurs d'envie d'atteindre leur niveau dans la maîtrise de mon écriture.
Si vous me parlez de début avril, je vous dirais que c’était très, très loin. Parce que je me rappelle être allée au Mont-Saint-Michel au début du mois, mais j’ai l’impression que ça fait un siècle.
Si vous êtes nouveaux sur cette newsletter : bonjour, je m’appelle Lydie, je suis l’autrice de plusieurs romans publiés, en cours de publication et pas publiés, et mon projet actuel, Devotia, est inspiré du Mont-Saint-Michel.
Et s’il y a quelque chose que j’adore faire, c’est voyager là où se déroulent mes histoires. Si vous avez lu les Fleurs (Les fleurs les plus dangereuses n’ont pas d’épines pour les non-initiés), vous le savez : je suis une autrice d’ambiance. J’ADORE que l’on se sente immergé dans mon histoire.



Je veux que mon lecteur entende le bruit des carrioles sur les pavés, qu’il sente le parfum de la pluie fraîchement tombée et plisse les yeux sous le soleil de midi. Alors pour Devotia, je devais aller au Mont-Saint-Michel pour sentir l’air marin et voir la baie de sable qui s’étend tout autour.
Non seulement j’ai eu la chance d’avoir une météo splendide, mais la saison touristique n’étant pas “officiellement” lancée, il y avait beaucoup moins de touristes que ce que le site peut connaître dès mai. J’ai pu prendre de nombreuses photos du paysage et j’ai également découvert comment régler un souci technique dans mon manuscrit.



Fast-forward du vendredi 18 au dimanche 20 avril pour : l’Ouest Hurlant ! J’ai assisté à la rencontre avec Laura Nsafou à ma bibliothèque le vendredi, avant d’être embarquée dans le roller-coaster du festival le samedi et le dimanche.
Mon samedi en bref : des dédicaces (à côté de CHRISTELLE DABOS, pitié) et des petits trous par-ci par-là pour que j’aille assister à des tables rondes.


Le dimanche, c’était à mon tour de me casser la voix, avec deux tables rondes le matin. La première, “Au bûcher ! La mort des personnages minorisés”, se déroulait avec Morgan of Glencoe et Sole Otero. Si vous n’étiez pas présents, elle devrait normalement sortir sous forme de podcast vers la fin de l’été (comme à chaque édition de l’Ouest Hurlant).
La deuxième, “Les voyages forment l’imaginaire”, avait lieu avec Floriane Soulas et Cassandre Lambert. Et franchement, on aurait pu parler pendant trois heures au lieu de l’unique heure prévue tant il y avait de choses à dire (en même temps, si vous lisez cette newsletter depuis un bout de temps, ça ne devrait pas vous surprendre !).
J’ai également participé au live Twitch du festival avec Chimène (aka la.chimere sur Instagram), où nous avons accidentellement maudit les spectateurs en discutant légendes urbaines japonaises (et oui, on parlait du Crépuscule des légendes).



Bref, merci d’être venus me voir à l’Ouest Hurlant si vous êtes venus, d’avoir regardé mon passage sur Twitch si vous l’avez regardé, merci de continuer à faire vivre les Fleurs plus d’un an après sa sortie (coucou le bookclub queer de Rennes !), et surtout merci de continuer à me faire confiance, à me lire, que ce soit mon roman ou cette newsletter !
Dites vous que j’ai été sold out le dimanche autour de l’heure du déjeuner alors que je venais à peine de finir mes tables rondes (joke on me, la librairie ne m’avait pas prévu assez de stock, mais au moins la prochaine fois je saurais quelle quantité demander pour un salon de deux jours !).
Le mois a été culturellement riche puisque je l’ai conclu en venant passer quatre jours à Paris, où j’en ai profité pour voir l’exposition Aubusson tisse Tolkien au Collège des Bernardins (elle est gratuite et se termine le 18 mai, alors foncez !) ainsi que la rétrospective sur Wes Anderson à la Cinémathèque de Paris. J’ai également eu le temps d’aller voir Sinners, de Ryan Coogler, dans le Pathé le plus comfy que j’ai jamais vu.



Mais nous reparlerons de mon séjour parisien plus tard, et plus précisément sur le canap’ de l’écriture. Avant de parler artistes passionnés et passionnants, faisons le point sur mes projets…
J’ai l’impression d’avoir écrit la newsletter d’avril hier, et le contenu de cette section pourrait être : identique.
Bienvenue dans la vie d’autrice donc, où je n’ai pas avancé sur mon projet en cours, à savoir Devotia. Bon, en vrai, je me suis un peu décidée à donner une définition à “retravailler” et j’ai décidé que j’allais peaufiner mon worldbuilding des trois premiers chapitres autant que possible.
J’ai donc fait appel à trois bêta-lectrices, lectrices habituelles d’imaginaire ou non, pour avoir leurs retours (que je n’ai pas encore ouverts car une autre deadline m’attend pour le moment).
Ce n’est pas le passage le plus passionnant de cette lettre, mais je suppose que c’est une très bonne démonstration de ce qu’est être autrice : on n’écrit pas tout le temps, et parfois il y a des pauses comme ça qui ne s’expliquent pas.
Je perds mon temps comme on perd ses clés et je passe mon temps à le chercher, pour me rendre compte qu’il était dans ma poche depuis le début mais que j’ai été trop étourdie pour m’en rendre compte.
Après, c’est aussi l’occasion de mettre en lumière un autre aspect de l’écriture, j’ai nommé le ✨brainstorming✨.
Je crois l’avoir déjà expliqué : j’ai tout un dossier dans les notes de mon téléphone consacré à mes idées de romans. Chaque note est plus ou moins actualisée avec de nouvelles informations quand j’en ai (une chouette idée qui passe par là et zou).
Et chaque idée est sur le feu dans mon cerveau. Ça mijote tout doucement, parfois si bas qu’il n’y a aucune bulle à la surface mais quand on y trempe le doigt pour goûter, c’est bel et bien chaud. (J’aurais pu trouver moins alimentaire comme métaphore, je suis d’accord.)
Eh bien ce mois-ci, j’ai un peu réfléchi à Hôtel Asphodèle (dont je vous ai déjà parlé il y a si longtemps que je serais incapable de vous dire dans quelle lettre, probablement la n°6 ou la n°7 ?). J’ai noté quelques éléments de worldbuilding et je cherche encore la direction qu’aura l’intrigue.
Il ne correspond pas aux codes du young adult et je ne sais pas de quoi il parle (à part de mort), donc difficile de le caser d’office en adulte, surtout que les protagonistes ont *environ* la vingtaine d’années (mais ils sont morts au siècle dernier, donc techniquement, quatre fois plus).
J’ai également réfléchi à mon projet de littérature adulte/réalisme magique, dont je pense vous avoir déjà dit quelques mots sous le nom de projet Ourse (ou Ourses ?). Je sais comment le roman débute, j’ai une idée de ce qui se passe au milieu et à la fin. Mais comme je le prévois comme un texte très centré sur les personnages plus que sur les événements, difficile d’établir un plan d’entrée de jeu.
Je pense que ce sera typiquement le genre de manuscrit qui se révélera au fur et à mesure de l’écriture, qui sera plus laborieuse que mes autres projets d’imaginaire. Donc pour celui-là, pas de challenge d’écriture façon NaNoWriMo (d’ailleurs je ne sais pas si vous avez suivi, mais le NaNoWriMo ferme officiellement ses portes).
Bref, avril c’était de la réflexion et encore de la réflexion.
Je ne suis pas du genre à sauter d’un projet à l’autre, me demandant ce que je dois écrire pour être publiée. J’ai une règle très simple que je m’efforce de suivre : interdiction de commencer un nouveau roman du même genre si je ne termine pas le précédent. Et je les choisis en fonction de mes compétences.
En résumé : je peux commencer projet Ourse si je le souhaite (ou projet Japon), mais aucun projet d’imaginaire young adult, tant que je n’ai pas terminé Devotia. J’aimerais reprendre l’écriture ce mois-ci et pourquoi pas finir cet été. En tout cas, en novembre, je commence un nouveau roman (je vous en dis plus très bientôt), donc Devotia aura son point final cette année, PAS LE CHOIX.
Sur ce, asseyons-nous confortablement sur notre canap de l’écriture et entrons dans le vif du sujet, à savoir le thème de cette newsletter.
Ce n’est pas une coïncidence si Hôtel Asphodèle a brusquement resurgit dans mon esprit ce mois-ci. Comme je l’expliquais plus haut, j’ai profité d’une semaine de repos pour faire un saut à Paris et voir plusieurs expositions, dont la rétrospective dédiée à Wes Anderson à la Cinémathèque de Paris (et film important de sa filmographie : The Grand Budapest Hotel).
Je connais le cinéaste surtout de nom et je n’ai vu que Fantastic Mr Fox (au Japon, quand je travaillais à Hakuba, grâce à mon amie australienne Stella). Mais une bonne partie de sa filmographie est sur ma watchlist depuis plusieurs années déjà et 2025 sera l’année où je me lance, promis juré.
Premier point marquant de cette exposition : le jeune âge auquel Wes Anderson a commencé sa carrière, à savoir la vingtaine. L’occasion de découvrir qu’il a rencontré Owen Wilson à l’université, à son cours de scénario, et que c’est tout naturellement qu’ils ont commencé à travailler ensemble.
Un bout de l’expo montrait les carnets de Wes Anderson criblés de notes, les Polaroïds qu’il prenait sur ses tournages et ses storyboards qu’il dessinait lui-même avec un trait plus qu’enfantin.



Je pense qu’il s’agit de ma partie préférée de la rétrospective, parce qu’avant de montrer les débuts d’un grand réalisateur au style si particulier qu’il en devient une tendance sur les réseaux sociaux, elle montre un jeune homme passionné, qui a appris son métier en autodidacte.
Non seulement ça, mais on le voit produire ses premiers films avec des acteurs dont la popularité est aujourd’hui indiscutable. Pas par chance, ou par opportunisme, mais parce qu’ils étaient plusieurs à avoir une passion pour le cinéma, qu’ils se sont trouvés presque par hasard, et qu’en travaillant ensemble, en combinant leur passion, ils ont réussi à se faire leur place dans le milieu.
Et je trouve ça trop cool. Bien plus cool que des vidéos dégueulasses générées par intelligence artificielle à partir de films déjà existants parce que cet outil ne peut qu’imiter.
Alors que c’est tellement plus inspirant de voir des gens passionnés, qui consacrent leur vie à devenir bon voire exceller dans un domaine artistique par pure admiration et appréciation de ceux qui les font rêver.

Quand Timothée Chalamet a reçu son Screen Actors Guild Award en février et qu’il a dit être inspiré par les plus grands et vouloir en faire partie, I felt that. Bien sûr qu’il s’est pris des critiques l’accusant d’être prétentieux, arrogant.
Pour moi, beaucoup ont mal compris Timothée Chalamet et se disaient qu’il déclarait juste vouloir être plus célèbre encore.
Ce n’est pas ce que j’ai compris en l’écoutant, et ce n’est pas non plus ce que j’ai ressenti en parcourant le travail décortiqué de Wes Anderson à la Cinémathèque.
Ce que j’ai compris, c’est que les artistes les plus inoubliables et les plus talentueux sont ceux qui ont trouvé comment s’approprier leur art d’une façon si propre à eux-même qu’ils l’ont transcendé. Ce qu’on admire, ce n’est pas tant une filmographie ou une discographie qu’une identité, une sincérité qu’on rêve de pouvoir imiter.
À la fin de l’exposition, ce que j’ai retenu, c’est à quel point Wes Anderson avait réussi à retranscrire son style si particulier dans chacun de ses films, mais jamais de la même façon. Plans, musique, couleurs, costumes, goût du détail… On le voit, on sait que c’est lui. Et je pense qu’il n’y a rien de plus saisissant que de voir son identité et sa personnalité artistique reconnues d’un seul coup d’oeil parmi mille autres.



C’est ça qui me motive. Pas la popularité, le succès (même si je ne dis pas non, faut bien payer son loyer). J’ai envie qu’il y ait ce fil conducteur à travers mes romans qui fait qu’après lecture, ce soit une évidence que c’est moi qui les ai écrits. Que mes textes, bien qu’assez différents les uns des autres, aient cette empreinte invisible mais palpable, qu’on me voit à travers les lignes.
C’est pour ça que des artistes comme Wes Anderson, Hayao Miyazaki, Allan Menken, Lin-Manuel Miranda ou Hans Zimmer sont populaires, qu’on apprécie ce qu’ils font ou non. Un plan, un croquis, quelques notes de musique et on sait que c’est eux. Ils ont un style.
En écriture, je l’ai déjà dit mais je considère futile le fait de se focaliser sur son style à travers sa plume uniquement. Pour moi, le style, c’est la sincérité. J’écris de la meilleure façon possible pour l’histoire entre mes mains. Peu importe qu’un de mes romans ait une prose lyrique tandis que l’autre aura un ton plus cru.
Le style, c’est au-delà des mots que l’on emploie, c’est dans les thèmes, le regard que l’on porte sur son histoire, ses personnages. C’est notre personnalité lisible entre les lignes.
Je parlais d’IA dans le titre de ma newsletter. Et j’estime que non seulement une IA ne peut pas être artiste, mais elle ne peut pas faire de vous un.e artiste. L’Art, c’est une voix, une personnalité. Et quelle personnalité possède une IA configurée pour vous donner la réponse la plus satisfaisante à vos questions ? Aucune.
J’ai tendance à repérer les illustrations IA d’un simple coup d’oeil, et on me demande souvent comment. Voici la réponse : quand on cherche une personnalité dans chaque oeuvre, c’est très, très facile de voir celles qui n’en ont aucune.



Alors cherchez les artistes à travers leurs oeuvres. Cherchez le dernier coup de pinceau posé sur une illustration, les petites références qu’une autrice glisse dans toutes ses histoires, une suite de notes qu’un musicien réutilise dans la plupart de ses compositions.
Cherchez les détails et essayez de faire parler l’artiste à travers eux, que ce soit un trait particulièrement hachuré, des phrases saccadées ou un instrument qui joue tellement en arrière-plan qu’on le perçoit à peine.
Quand vous plongerez dans toutes les oeuvres que vous croisez à la recherche de quelque chose de profondément humain, vous repérerez vous aussi assez vite les ordinateurs qui prétendent pouvoir être à leur hauteur.
Et puis, accessoirement, l’Art ne saurait se réduire à une simple esthétique
On notera l’absurdité écoeurante de voir tout Internet générer sa photo “dans le style Ghibli” à travers des IA terriblement énergivores et polluantes alors qu’un propos fréquent dans l’oeuvre du Studio Ghibli est justement la critique de la destruction environnementale par l’être humain.
Franchement, je ne vois pas quelle fierté il y a à étaler sur ses comptes une “oeuvre” que l’on a pas faite soi-même. Je suis censée applaudir quoi, le fait de savoir écrire une phrase dans une barre de recherche ? C’est aussi stupide que de commander sur Uber Eats et de prétendre être un cuisiner parce qu’on a rajouté du parmesan sur son plat. Bref, je pourrais disserter des siècles sur ce sujet et même en faire un podcast.
Je tiens tout de même à rajouter quelque chose : oui, je pense que la passion est primordiale pour produire une oeuvre qu’on aime et qui marque. Mais le nerf de la guerre, c’est le temps.
Nous n’avons pas tous le temps de créer (une autre dissertation sur le capitalisme qui contrôle notre temps), surtout les plus précaires, et beaucoup se servent de cette excuse pour justifier leur utilisation de l’IA générative. C’est un piège qui nous est tendu et je pense que nous ne devons pas tomber dedans, nous ne devons pas accepter que notre temps nous est tellement volé de tous les côtés que l’IA est la solution.
La solution n’est pas de créer à partir de machines qui condensent de l’art déjà créé sur Internet. La solution est de changer la société pour que nous ayons ce temps nécessaire pour créer et faire communauté autour de l’Art, qui ne devrait jamais être un luxe.
Et puisque je ne fais que parler d’inspiration depuis le début de cette lettre, continuons sur cette lancée.
La lecture ces derniers temps, c’est laborieux, ne nous mentons pas. J’ai ENFIIIIN fini A tempest of tea d’Hafsah Faizal. Je ne sais pas si c’est moi, la traduction ou l’histoire de base, mais j’ai passé les deux tiers du livre dans une sorte de flou, à avoir du mal à visualiser les endroits et me rappeler qui était qui.
J’ai bien fini par discerner les contours de l’histoire (un peu comme si j’avais lu sans mes lunettes tout ce temps et BIM, je le remets sur mon nez) et j’ai vraiment été investie dans la fin (j’ai même presque envie de lire la suite). Mais pfiou, c’était dur. J’attends LA lecture qui me permettra de sortir de cette galère littéraire.
Sinon, je suis allée au cinéma rentabiliser mon abonnement Pathé, parce que 23€ quand même. Absolument passé sous les radars : Lads, un film français sur un jeune délinquant qui finit apprenti jockey dans une écurie de courses d’obstacles. Évidemment, son passé n’est jamais bien loin.
C’était franchement une bonne surprise. Ce n’est ni tragique ni mielleux, et ça dépeint le monde des courses de chevaux de façon assez crue/vraie, avec une fin en suspens mais dont on se doutait.
J’ai également pu voir Sinners de Ryan Coogler et AAAAAH, je pourrais aussi disserter sur ce film pendant des heures. Quand vous le voyez, le film est cool. C’est un film d’horreur avec un côté fantastique, bien dosé en jumpscares, en humour et en scènes de cul.
Le mieux, c’est le après. Quand vous commencez à analyser les symboles à travers les costumes (conçus par la géniale Ruth E. Carter, connue pour son travail sur Black Panther entre autres), les plans, les dialogues, TOUT.
Sinners est un film original, différent de tout ce qui sort aujourd’hui rien que par son cadre (années 30 dans le Mississippi), son casting (majoritairement des acteurs noirs) et les folklores dans lesquels il pioche allègrement, allant du hoodoo à la culture irlandaise. Ça donne un film avec beaucoup de couches et plein de trucs cools à analyser, que ce soit pour parler culture, religion, musique et j’en passe.

On en revient à ce que je disais plus haut : j’adore voir des artistes passionnés sortir des oeuvres qui leur ressemblent et qui inspirent les autres à se dépasser de la même façon dans leur art.
J’adore voir Ryan Coogler parler dix minutes sur le compte Twitter de Kodak de la façon dont il a filmé Sinners et des différents formats utilisés pour servir la cinématographie. Rien, rien ne peut remplacer la passion et je crois que c’est pour ça que l’on admire les gens talentueux. Parce que c’est profondément humain et inimitable, et qu’il y a une sorte “d’aura” dans le fait de s’approprier un médium au point qu’il surpasse notre simple voix.
Enfin, j’ai également profité de mon passage sur Paris pour voir la pièce Le porteur d’histoire, d’Alexis Michalik, au théâtre du Montparnasse. J’ai apprécié la versatilité des cinq comédiens qui font vivre une trentaine de personnages sur scène et la manière dont une intrigue aussi complexe a pu être adaptée à la scène. J’ai moins été fan de la manière dont la guerre d’Algérie a été utilisée narrativement.
J’ai l’impression d’avoir passé un mois d’avril sur les chapeaux de roue et en même temps de ne pas avoir fait grand chose. Le mois dernier, quelqu’un réagissait à ma newsletter en exprimant être impressionné.e de tout ce que je faisais et j’étais là : moi ????????
J’ai surtout l’impression de courir partout comme un poulet sans tête, sans jamais réussir à faire tout ce que je veux (mais peut-être que je veux faire trop de choses, ce qui ne m’aide absolument pas).
Après, ces derniers jours, j’ai commencé à ressentir ce *petit truc*, une sorte de pression que j’ai quand je commence à avoir trop de choses à faire et que je suis soudain poussée dans le dos vers l’efficacité.
Mai devrait être un mois plus calme (je pense ?). J’ai déjà ma deadline immédiate à compléter (pour cette semaine !), puis gérer les retours de mes bêta-lectrices sur les premiers chapitres de Devotia, avant peut-être de commencer à poser des notes ou des mots sur projet Ourse (ou simplement de continuer d’écrire Devotia).
J’ai tendance à ne pas me fixer d’objectifs à la semaine ou au mois car pour peu qu’on soit malade, travaille beaucoup ou autre, on se retrouve à la traîne et on culpabilise ; et je n’ai pas envie de culpabiliser sur des objectifs que je me suis fixés sans raison, parce que rien ne presse.
Je pense qu’en dehors de l’IA, c’est quelque chose qu’on peut retenir de cette lettre : c’est ok de prendre le temps. De pas écrire parce qu’on galère un peu à s’y mettre, de réfléchir à la place, de faire du worldbuilding voire même de basculer sur une autre pratique artistique.
Je crois fermement que tout ce qu’on fait dans la vie nourrit notre art d’une façon ou d’une autre. Cette année, j’essaie par exemple d’aller régulièrement au ciné (janvier a pulvérisé les compteurs), mais je m’oblige aussi à aller voir au moins deux expositions dès que je monte sur Paris et j’ai pour objectif de voir une pièce de théâtre par mois.
Bref : notre temps n’est jamais vraiment perdu. Vivre n’est pas une perte de temps. C’est nécessaire pour créer puisque c’est notre matière première.



On se retrouve le mois prochain ?
"Nous n’avons pas tous le temps de créer [...], surtout les plus précaires, et beaucoup se servent de cette excuse pour justifier leur utilisation de l’IA générative. C’est un piège qui nous est tendu et je pense que nous ne devons pas tomber dedans [...]"
Oui, en plus c'est tenter de récupérer du temps en volant à un autre, puis bon l'impact écologique... Étant souvent frustrée de voir le temps filer à toute vitesse (on est déjà à la moitié de l'année ???) je peux comprendre l'envie de céder à ces outils chez certains (par contre, je ne pourrais pas, ça n'aurait aucune satisfaction de n'avoir pas dessiné moi-même), et tout pousse à être productif un max, mais c'est pas la solution.
Merci de partager sur tes projets, tes sorties et tes inspirations. On doit aller voir Sinners avec une amie car ce n'est pas encore trop tard !
Récemment, j'ai vu la pièce de théâtre Big Mother. Les personnages principaux sont des journalistes d'investigation et pour avoir travaillé avec, et aussi avec des data journalistes, le sujet était bien traité. La mise en scène est efficace, par contre, le rythme est parfois trop effrené.
Lydie, il y a tellement de VÉRITÉ dans cette Newsletter (que je lis un peu tard...). MERCI ! ♥
J'ai particulièrement apprécié ton analyse sur l'IA, la façon dont on manque de respect à Miyazaki (et aux autres) et cette mise en abîme avec le piège du temps, le capitalisme, etc. C'est BRILLANT. Et merci aussi de dire que "vivre n'est pas une perte de temps". On l'oublie trop souvent avec cette injonction à la productivité constante. C'est ça qui est beau avec la création aussi : y accorder et lui offrir du temps. ♥